Les bases d’un Contrat Territorial Concerté d’Accompagnement aux Usages du Numérique

Il y a quelques jours, et suite à la proposition que j’ai formulée lors des vendredis contributifs sur l’e-inclusion organisés par le Conseil National du Numérique, j’ai avancé l’idée de la mise en œuvre d’une politique contractuelle que j’ai appelé Contrat Territorial Concerté d’Accompagnement aux Usages du Numérique. Certains, intéressés , que ce soit au sein du conseil ou dans le cadre des missions qui me sont confiées, m’ont demandé de formaliser plus précisément la proposition. Je le fais bien volontiers sous la forme de questions réponses.

Pourquoi?

Parce que :

  • pour exercer aujourd’hui sa citoyenneté, il convient de maîtriser un socle minimum de compétences numériques à savoir :
      • gérer son identité numérique
      • s’informer et informer
      • gérer ses démarches administratives
      • consommer dans le cadre de choix raisonnés et maîtrisés
      • être en capacité de participer à une expression publique.
  • le numérique est transversal à tous les aspects de la vie sociale et professionnelle et de ce fait interpelle nécessairement tous les acteurs du développement social et professionnel dans leur missions en direction de leurs publics,
  • même si le numérique est transversal, les bouleversements sont tels qu’ils imposent des dispositions particulières pour former, mettre en synergie tous les acteurs  d’un territoire.
  • l’expérience montre que c’est lorsqu’il y a une orientation et un soutien politique affirmés que les projets d’e-inclusion sont les plus pertinents et efficaces.

Pour qui ?

Pour toutes les catégories de la population en ayant une attention toute particulière pour les publics les plus en difficulté d’intégration sociale et professionnelle. Sans exclusive car le numérique s’étant imposé dans les milieux professionnels et la formation par des pratiques essentiellement personnelles, il convient de définir des règles d’usages communes.

Par qui ?

Par les collectivités territoriale (communes, EPCI) qui ont la légitimité pour sensibiliser et mobiliser l’ensemble des institutions, associations et organismes agissant sur leur territoire, dans les champs du développement social et éducatif, l’insertion et la vie citoyenne.

Avec qui ?

Avec

  • l’ensemble des acteurs de
      • l’éducation (établissements scolaires, organisme des temps peri et extra scolaire)
      • l’insertion sociale et économique (centres sociaux, organismes d’insertion, mission locale, ….)
      • l’action culturelle (MJC, service association et établissements culture, …)
  • des porteurs de projets spécifiques au numérique : EPN, projet de co-working et autres tiers lieux, associations du logiciel libre et plus globalement tous les acteurs des projets pouvant apporter une expertise particulière dans le domaine des usages du numérique.
  • Les représentants territoriaux des administrations et institutions fortement engagées dans la dématérialisation des services (CAF, CPAM, Finances, Pôles Emploi, Éducation Nationale, …)

Comment ?

En élaborant dans le cadre d’une démarche participative un plan de développement des usages du numérique du territoire sur le bases suivantes :

  • Dresser dans un premier temps un état des lieux des usages et de pratiques afin de repérer l’existant, les atouts et le freins pour développer une politique cohérente.
  • Inviter l’ensemble des acteurs repérés et potentiels à :
      • pointer les atouts et les manques,
      • définir les thématiques prioritaires,
      • fixer des objectifs
      • imaginer les projets et les dispositions à prendre afin de les traduire dans un plan de développement des usages du numérique d’un territoire.
  • Organiser leur mise en réseau et la gouvernance du contrat car le numérique c’est fondamentalement :
    • dupliquer…
    • diffuser…
    • regrouper, relier, …
    • ouvrir vers l’extérieur…
    • mutualiser…
    • faire ensemble.

Avec quels moyens ?

En mobilisant l’ensemble des moyens humains, matériels et financiers déjà existant :

  • humain ; car il convient aujourd’hui que chaque professionnel, militant ou bénévole du développement social, éducatif et économique ne considère pas les usages du numérique ni comme une activité en tant que telle, ni comme une surcharge de travail, mais bien en intégrant le numérique dans son action quotidienne,
  • matériel ; en « rentabilisant » les équipements existants et en permettant des usages partagés dès lors qu’ils sont prévus au plan de développement.

En inscrivant les actions du plan de développement dans les politiques contractuelles déjà existantes ou à venir : Contrat de ville, Plan Éducatif Local, Contrat Enfance, …

En se dotant au minimum d’un pôle ressource pouvant apporter l’expertise nécessaire et assurer la coordination générale du plan. Il convient à ce titre d’intégrer toute la réflexion actuelle autour de l’évolution des missions de l’EPN

En dégageant des moyens spécifiques.

  • Au niveau des collectivités territoriales qui doivent contribuer financièrement ou/et matériellement au développement du plan de développement du numérique (création d’un EPN, mission de coordination, …)
  • Au niveau des Départements, des Régions dans le cadre de leurs prérogatives à l’exemple du pass-numérique de la Région Rhône Alpes
  • Au niveau de l’État qui doit soutenir financièrement les collectivités avec qui il peut contractualiser dans le cadre de la proposition de Contrat Territorial Concerté d’Accompagnement aux usages du numérique . (financement d’un poste de coordinateur, mobilisation du dispositif emploi avenir, dotation financière… )

Avec quelle garantie d’application ?

En invitant toutes les parties concernées à être signataires du contrat:

  • Acteurs du terrain, institutions et associations qui s’engagent à mettre en œuvre les actions qu’ils ont proposées.
  • La collectivité territoriale qui s’engage à garantir la gouvernance du contrat et les moyens qu’elle peut y consacrer.
  • Les partenaires institutionnels : Région , Département, Caf, Pole Emploi , ….etc qui valident ainsi les formes d’aides.
  • L’État qui valide la démarche et débloque les moyens spécifiques.

Pour résumer, le Contrat Territorial Concerté d’Accompagnement aux Usages du Numérique se met en place et s’organise autour :

  • d’une démarche participative engageant l’ensemble des acteurs du développement social, éducatif d’un territoire ,
  • la réalisation d’un état des lieux et d’un diagnostic qui pointent les atouts et les freins ,
  • la conception et la formalisation d’un plan de développement des usages du numérique qui affiche les objectifs, les priorités,  les actions et un calendrier ,
  • une gouvernance qui garantit l’animation et la mise en œuvre du plan ,
  • l’engagement des acteurs qui réalisent le plan , des institutions et partenaires qui assurent les moyens de sa mise en œuvre.

Cette proposition est née de l’expérience acquise et ce sont ces principes et cette démarche qui guide la méthodologie que j’applique actuellement sur les commandes qui me sont faites.

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Jacques HOUDREMONT